16 mai (Reuters) -

Des centaines de personnes ont été arrêtées depuis le début des violences en Nouvelle-Calédonie, alors que les troubles alimentés par le projet de réforme constitutionnelle élargissant le corps électoral de l'île se sont poursuivis dans la nuit de mercredi à jeudi.

Dans trois communes de l'île, la gendarmerie a été confrontée à un grand nombre d'émeutiers, "de l'ordre de 5.000 et sur la ville de Nouméa, entre 3.000 et 4.000", a dit le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, Louis Le Franc, lors d'une conférence de presse.

Deux cents émeutiers ont été interpellés et 64 gendarmes et policiers ont été blessés, a-t-il précisé.

Le gouvernement français a déclaré mercredi, à la demande du président Emmanuel Macron, l'état d'urgence en Nouvelle-Calédonie, alors que les violences ont fait quatre morts dans la nuit de mardi à mercredi.

L'état d'urgence est entré en vigueur jeudi à 05h00 du matin (mercredi 18h00 GMT, soit 20h00 à Paris), pour une durée de 12 jours. Le réseau social TikTok est par ailleurs interdit sur l'île.

Yoan Fleurot, un habitant de Nouméa, a déclaré à Reuters qu'il avait été témoin de pillage et de destructions. Certains commerçants ont laissé leurs magasins être pillés, demandant que leurs commerces ne soient pas détruits, a-t-il dit.

Des barrages jalonnent les axes routiers, ce qui rend les déplacements difficiles, a-t-il expliqué.

"Moi qui suis Calédonien, je ne connais plus mon pays actuellement", a dit Yoan Fleurot. "La Calédonie va avoir du mal à se relever de cette crise. (...) Tout, 80% est détruit."

Louis Le Franc a expliqué que des barrages avaient été établis sur les axes routiers principaux et secondaires de l'agglomération du Grand Nouméa et que certains d'entre eux étaient piégés avec des bouteilles de gaz et des systèmes d’allumage.

"Je mets en demeure ceux qui sont à la tête de la CCAT (Cellule de coordination des actions sur le terrain) de cesser ces actions, qui sont des action meurtrières, mortelles, qui peuvent endeuiller des familles", a-t-il dit.

Le haut-commissaire de la République a indiqué que des confrontations avaient entre des membres actifs de la CCAT et des groupes d'autodéfense avaient eu lieu.

"On lance un appel au calme", a-t-il dit. "Je leur demande à tous de respecter le couvre-feu. De respecter l'interdiction de port d'armes, de transport d'armes et de rassemblement dans l'agglomération de Nouméa."

Louis Le Franc a déclaré que les destructions engendrées par les émeutes étaient "considérables" et qu'il pensait qu'elles pouvaient représenter "des centaines de millions d'euros" de dégâts.

Cinq assignations à résidence ont été prononcées par le ministre de l'Intérieur à l'encontre de commanditaires présumés des troubles à l'ordre public, a par ailleurs indiqué le Haut-Commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie dans un communiqué.

L'aéroport de Nouméa reste fermé aux vols commerciaux et la population est appelée à limiter ses déplacements au strict nécessaire, précise le communiqué.

Les violences sont alimentées par le projet de réforme de la Constitution visant à élargir aux personnes résidant depuis dix ans dans l'archipel le corps électoral, figé depuis l'accord de Nouméa de 1998.

Le texte, approuvé par l'Assemblée nationale dans la nuit de mardi à mercredi, doit désormais être soumis à l'approbation des parlementaires réunis en Congrès, qu'Emmanuel Macron s'est engagé à convoquer à la fin du mois prochain en l'absence d'un accord politique plus large entre les parties calédoniennes. (Kirsty Needham à Sydney, Louise Dalmasso et Michaela Cabrera à Paris; version française Camille Raynaud)