Moscou (awp/afp) - Le produit intérieur brut de la Russie a augmenté de 5,4% sur un an au premier trimestre 2024, a annoncé vendredi l'agence nationale des statistiques Rosstat, une croissance tirée par l'explosion des commandes militaires pour poursuivre l'assaut contre l'Ukraine.

Cela marque une accélération, après une croissance de 4,9% au dernier trimestre de 2023, une expansion dont se vante la Russie qui estime avoir fait échouer les sanctions occidentales adoptées dans la foulée de l'assaut sur l'Ukraine en 2022.

Depuis deux ans, l'effort de guerre est en réalité devenu le moteur de l'économie russe.

Au premier trimestre de l'année, l'activité en Russie a aussi été poussée par des prix favorables sur les marchés des hydrocarbures.

Les dépenses totales de l'État ont explosé de 20% sur un an, selon le ministère russe des Finances.

Pour gérer au mieux les grands investissements du ministère de la Défense, Vladimir Poutine a nommé dimanche à sa tête Andreï Belooussov, un économiste, en plein scandale de corruption ayant envoyé plusieurs dirigeants de l'armée en prison.

Le budget de la Défense et de la sécurité dans son ensemble s'élèvera cette année à "environ 8,7%" du PIB, a révélé Vladimir Poutine mercredi lors d'une réunion avec M. Belooussov et de hauts gradés.

Vendredi, il a encore jugé qu'un tel niveau de dépenses n'était "pas critique" et même "tout à fait normal".

"C'est une grande ressource. Nous devons l'utiliser avec beaucoup de soin et d'efficacité", a-t-il réclamé, en comparant la situation au milieu des années 1980, quand l'URSS dépensait, selon lui, 13% de son PIB dans le secteur militaire.

Il est "extrêmement important" d'intégrer l'économie du "bloc sécuritaire" dans "l'économie globale du pays", a dit mercredi M. Poutine.

Cette semaine, en déplacement en Chine, le président russe a réinsisté que son nouveau ministre de la Défense aura pour mission d'intégrer au mieux le secteur de la défense dans l'économie, notamment l'innovation.

En 2023, les dépenses militaires russes avaient représentées 5,9% du PIB, en augmentation de 24% par rapport à 2022, selon l'institut spécialisé Sipri.

M. Belooussov, partisan d'un rôle important de l'Etat dans l'économie, a lui assuré mardi que sa priorité était d'"optimiser les dépenses".

Inflation toujours forte

Signe d'une conjoncture favorable en l'état pour l'économie russe, le FMI a récemment revu à la hausse ses prévisions de croissance, anticipant désormais une hausse du PIB de 3,2% en Russie sur l'ensemble de l'année 2024.

Mais cette dépendance accrue envers le complexe militaro-industriel a entraîné un revers de la médaille, qualifié de "surchauffe" par les observateurs.

Le taux de chômage a atteint en mars son plus bas historique, à 2,7% de la population active, traduisant des pénuries de main d'oeuvre persistantes, liées à la crise démographique et au départ de centaines de milliers de jeunes hommes au front ou à l'étranger, ce qui pousse les salaires à la hausse et accentue les pressions inflationnistes.

La hausse des prix, l'une des principales préoccupations de la population russe, a atteint en avril 7,8% contre 7,7% en mars, selon Rosstat, bien au-delà de l'objectif affiché de 4%, forçant la banque centrale russe à maintenir son taux directeur à 16%.

"La menace de l'inflation (...) pèse toujours sur nous", a reconnu Vladimir Poutine fin avril.

Pour absorber au mieux les conséquences des sanctions occidentales, la Russie s'est fortement rapprochée de la Chine et de l'Inde, les deux mastodontes asiatiques, particulièrement demandeurs en énergie.

En visite jeudi et vendredi en Chine, Vladimir Poutine a de nouveau salué le renforcement des liens économiques et militaires entre les deux pays, pour contrer ce qu'il présente avec son allié Xi Jinping comme l'hégémonie américaine.

Les Occidentaux tentent, eux, depuis des mois de faire pression sur Pékin, accusé de faire le jeu de Moscou et de son conflit en Ukraine. Washington a notamment menacé de sanctionner les banques et les entreprises chinoises qui travaillent avec la Russie et certains ont déjà renoncer à accepter des paiements russes.

M. Poutine a dénoncé des mesures "doublement ou triplement illégitimes".

afp/rp